Un stockage d’énergie rapide et performant grâce à des nanoplumes de nitrure de ruthénium

Prisés pour leur puissance, leur charge rapide et leur durée de vie, les supercondensateurs sont très complémentaires des batteries. Une équipe internationale organisée autour du CNRS dont Christophe Lethien de l'Institut d'Electronique, de Microélectronique et de Nanotechnologie (IEMN)1 et Pascal Roussel de l'Unité de Catalyse et de Chimie du solide (UCCS)2 , du synchrotron Soleil et des universités de Lille, de Nantes, de Toulouse et de Californie a mis au point des électrodes, à base de nitrure de ruthénium (RuN), aux performances exceptionnelles. Parus dans Nature Materials, ces travaux comportent également des développements méthodologiques pour l’étude des processus électrochimiques à l’œuvre dans les supercondensateurs.

  • 1IEMN - CNRS / Université Polytechnique Hauts-de-France/ Université de Lille/ Junia / Centrale Lille Institut
  • 2UCCS - Université de Lille/CNRS/ Université d'Artois/Centrale Lille Institut

Les supercondensateurs stockent l’énergie électrique tout en offrant une puissance et une vitesse de charge supérieure aux batteries, et présentent cependant une moindre capacité de stockage. Une vaste équipe franco-américaine, rassemblant des chercheurs et chercheuses du CNRS, du synchrotron Soleil et des universités de Lille, de Nantes, de Toulouse et de Californie, a développé des électrodes à base de nitrure de ruthénium (RuN). Elles produisent une capacité de plus de 500 farads par centimètres cubes (F.cm-3). Cette capacité grimpe à 3200 F.cm-3 après un processus d’oxydation électrochimique qui a été analysé en temps réel (operando) sous rayonnement synchrotron. Ces électrodes présentent des constantes de temps inférieures à la dizaine de secondes, y compris avant oxydation, ce qui en fait de bonnes candidates pour des dispositifs de charge rapide. À titre de comparaison, les électrodes à base de MXenes, des matériaux bidimensionnels à l’état de l’art, atteignent environ 1500 F.cm-3 avec des constantes de temps similaires.

Les nouvelles électrodes reposent sur des films de nitrure de ruthénium (RuN), déposés par une méthode de pulvérisation cathodique optimisée dans le cadre de cette étude. Le matériau prend alors la forme d’une rangée de plumes poreuses, de dimensions nanométriques, dont le cœur est en nitrure de ruthénium et les bords en oxyde de ruthénium (RuO2). Lors de l’oxydation électrochimique, le RuO2 va s’hydrater (h-RuO2) et devenir le siège de réactions redox rapides à l’interface entre l’électrode et l’électrolyte. Les électrons générés sont ainsi transportés rapidement par le cœur des nanoplumes en RuN, qui forment un support particulièrement bon conducteur électrique. Au-delà des performances obtenues, cette étude aide à dévoiler les mécanismes réactionnels derrière ces résultats. Elle comporte en effet un volet sur la compréhension du stockage des charges operando, à l’aide de tout un panel de caractérisations avancées telles que la spectroscopie d’absorption des rayons X sous rayonnement synchrotron, ou encore la microscopie électronique à transmission. Cette technologie est en cours de transfert et de valorisation, avec le soutien de CNRS Innovation, au sein de la start-up Hileores, elle-même issue de précédents travaux menés par l’équipe lilloise.

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Comparaison de différentes électrodes, classées de gauche à droite en fonction de la vitesse de diffusion des ions et de celle du transport des électrons. L’électrode en nitrure de ruthénium est tout à droite.©Anne Duchene, Huy Dinh Khac et Christophe Lethien

Contact

Christophe Lethien
Enseignant-chercheur
Pascal Roussel
Directeur de recherche CNRS