PIB et transition écologique sont-ils compatibles  ?

CNRS le journal Economie, Gestion

Alpha et Oméga des politiques économiques depuis l’après-guerre, le PIB permet-il de répondre aux objectifs de la transition écologique  ? Pour certains économistes, cet indicateur strictement monétaire ne prendrait pas en compte les «  irréversibilités  » que sont les dommages à l’environnement.

Retrouvez cet article de CNRS le Journal, dans lequel Florence Jany-Catrice du Centre Lillois d'études et de recherches sociologiques et économiques1  qui rappelle notamment que « Le PIB n’est pas un totem intangible  ».

  • 1CLERSE - UMR8019 (CNRS, Université de Lille)

Difficile d’imaginer nos économies contemporaines sans leur boussole : le Produit intérieur brut (PIB) et sa fameuse croissance, scrutée année après année par les gouvernements de la planète entière. De plus en plus de voix s’élèvent cependant pour questionner la pertinence de cet indicateur face aux défis de la transition environnementale : le PIB, qui a accompagné les Trente Glorieuses et une croissance basée essentiellement sur les énergies fossiles, peut-il aujourd’hui permettre de lutter contre les émissions de gaz à effet de serre et l’érosion de la biodiversité ? Faut-il l’améliorer, le compléter, voire le remplacer par des indicateurs plus efficaces ?

Le PIB n’est pas un totem intangible, affirme Florence Jany-Catrice, économiste au Centre lillois d'études et de recherches sociologiques et économiques1, qui rappelle que sa création est relativement récente. « C’est à l’économiste américain Simon Kuznets qu’on attribue la paternité, au début des années 1930, d’un prototype de PIB appelé à l’époque “revenu national”, explique-t-elle. Simon Kuznets répondait alors à une demande du gouvernement des États-Unis – celui-ci n’avait pas réussi à anticiper la crise financière de 1929, et voulait disposer d’un indicateur permettant de mesurer la santé économique du pays. » Kuznets a construit un indicateur agrégé, qui additionnait revenus agricoles et industriels, et excluait une partie des activités de service jugées improductives.

Le PIB tel que nous le connaissons aujourd’hui n’a vraiment émergé qu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale, au moment où les systèmes de comptes nationaux ont été créés. « Le PIB a été imaginé pour accompagner les politiques publiques de reconstruction sur une base industrielle et marchande, rappelle Florence Jany-Catrice. Les fortes croissances enregistrées en France lors des Trente Glorieuses sont fortement liées à ce contexte. » Il a d’ailleurs fait l’objet de nombreux changements au fil des ans, intégrant par exemple en 1977 les services rendus par les administrations publiques qui en étaient jusqu’alors exclus, comme les soins médicaux ou l’enseignement, parce que rendus sur une base non marchande..

« Ce n’est que dans les années 1980/1990 que, d’indicateur de moyens, le PIB est devenu un indicateur de finalité, précise l'économiste. Aujourd’hui, les gouvernements ont pour principal objet d’accroître le PIB, c’est devenu un projet de société. » Mais est-ce une logique compatible avec une société plus sobre en carbone et en ressources naturelles ?

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Salon de l'automobile de Paris, en 1956.